mardi 14 février 2012

LA CARTOGRAPHIE EN AFRIK NOIRE: UN HÉRITAGE SCIENTIFIQUE MILLÉNAIRE

La première carte géographique du monde est africaine (- 1100 avant notre ère)


Une contribution de Nzwamba Simanga
« Il s'agit du Papyrus "des Mines d'or", d'une longueur totale de 2,82 m, et d'une hauteur de 41 cm: ce document se trouve actuellement au musée égyptien de Turin (Italie), conservé en grands fragments: collection Drovetti, n◦ cat. 1879, 1899, 1969. Ce Papyrus "des Mines d'or" date de la XXe dynastie, vers 1100 avant notre ère. C'est la plus ancienne carte topographique, géologique et géographique du monde. Le fragment ici reproduit est effectivement une carte des mines d'or et des carrières. Les itinéraires présentent les éléments les plus importants du paysage. Le relief du terrain et les édifices sont représentés avec un profil "rabattu" sur la surface. Des commentaires écrits en cursive antique (hiératique) complètent le dessin. La description géologique est faite avec des couleurs. La zone concernée a pu être identifiée: il s'agit effectivement de la région du Wâdi Hammâmât, région des montagnes de la chaîne arabique qui sépare le Nil de la mer Rouge, et où existent de nombreuses mines de quartz aurifère. Dans les environs du Wâdi Fawakir, entre Coptos et Kossein sur la mer Rouge, il existe aussi des mines d'or. L'or de Coptos et l'or de Kouch (Nubie) constituaient les deux principales sources aurifères de l'Égypte antique.[...] Essayons de comprendre au mieux ce que ce Papyrus des mines d'or égyptien laisse voir, après sa présentation générale esquissée plus haut. Deux routes parallèles sont encaissées entre deux chaînes de montagnes; celles-ci sont figurées selon la méthode de rabattement. L'une des routes est toute encombrée de blocs de pierres et de buissons. Une autre route transversale, qui décrit une courbe, relie les deux premières qui mènent toutes les deux vers le Nil. Les mines se trouvent dans les montagnes à pic, de part et d'autre de ces routes: "monts d'or", "les montagnes dans lesquelles on lave l'or". La principale route non encombrée de pierres (en haut du croquis) et la route qui part de celle qui est transversale, sont "des chemins qui conduisent vers la mer". L'une des montagnes porte le nom de "montagne pure"; près d'elle se trouvait un sanctuaire d'Amon. Les petites maisons sur la route principale (celle qui n'est pas encombrée de pierres) appartenaient aux ouvriers qui exploitaient les mines. L'étang et la tache foncée de la terre cultivée (au milieu du croquis) qui l'entoure représentent le puits du roi Sethi Ier (1312-1300 environ avant notre ère), second roi de la XIXe dynastie, fils de Ramsès Ier et père de Ramsès II. Le Pharaon Sethi Ier affirma la puissance égyptienne en Palestine, sur les Bédouins, les Libyens, les Anorrites de Qadesh, et résista victorieusement aux Hittites avec lesquels il signa la paix. La description géologique du Papyrus des mines d'or de Turin est faite avec des couleurs naturelles des zones: le rouge indique le granit; le noir, le basalte; le marron la terre; le blanc, les édifices. Jusqu'au XVIIe siècle de notre ère, les cartographes ont utilisé la méthode de "rabattement" (avant d'adopter la projection orthogonale): cette méthode fut inventée par les Égyptiens et leurs cartographes vers 1100 avant notre ère. D'autre part, la description topographiques est orientée comme "les itinéraires" de façons à présenter en haut les éléments les plus importants du paysage (avec le côté supérieur au Nord, dans notre croquis): le type de cette description sera très répandu à Rome puis au Moyen-Âge. Au total, on peut affirmer comme fait d'histoire que les anciens Égyptiens furent les premiers, tout autour de la Méditerranée antique, à établir une carte à la fois topographique et géologique; qu'ils furent par là même les inventeurs de la méthode cartographique de "rabattement" (projection) et des "itinéraires" . Ainsi, la topographie, soit la technique de représentation sur un plan des formes du terrain avec les détails naturels ou artificiels qu'il porte, a été inventée pour la première fois en Égypte, vers 1100 avant notre ère. Les faits de ce genre sont rarement reconnus et soulignés dans les manuels qui traitent de l'histoire des sciences et des techniques de l'humanité dans son ensemble. [...] La cartographie n'est pas absente de l'Afrique noire précoloniale. Des "cartes" existes, qui révèlent un sens de l'observation comme l'orientation. Décrire un chemin, se retrouver en brousse, connaître tout le milieu naturel (cours d'eau, forêts, savanes, collines, etc.), et être capable de tracer graphiquement le schéma d'ensemble des lieux, c'est avoir à faire à la cartographie, même rudimentaire. » Théophile Obenga, " La philosophie africaine de la période pharaonique" p.225-228
- Voici la région de Wâdi Hammâmât représentée sur la carte millénaire décrite ci-haut par le professeur Obenga: http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b5/Egypt_ancient_detail_wadi_hammamat.png

- Voici un débat sur les cartes que les Européens ont élaboré avec des intentions qui n'ont rien avoir avec la science: http://www.youtube.com/watch?v=DWoBxoCzKEE

- Voici le monde réel selon la projection de Peters: http://www.petersmap.com/

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